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  • Photo du rédacteurFlorence

De la Beauté

Dernière mise à jour : 1 mars

L'arrivée du printemps et la découverte de nouveaux livres me plongent dans le concept de beauté.


J'ai découvert par hasard dans une belle librairie, deux livres qui m'ont récemment beaucoup occupé l'esprit et la vue !

- Arbres, Un botaniste au musée, Christophe Drénou, Editions Fage, Lyon, 2018

- Arbres, Ji Dahai, Editions Picquier, Arles, 2019



Ces livres m'ont surtout fait reprendre dans ma bibliothèque personnelle mon livre de François Cheng, Cinq Méditations sur la beauté, Albin Michel, 2006. Une magnifique redécouverte.



Page 31, François Cheng me scotche littéralement avec cette phrase: " L'univers n'est pas obligé d'être beau, mais il est beau; cela signifierait-il quelque chose pour nous? "

Juste après la lecture de cette phrase je décide d'aller profiter du beau temps et des premières fleurs au parc. Je m'installe sous les cerisiers en fleur. Je prends un shoot de souvenirs du Japon. La nostalgie m'assaille. Puis j'ouvre les Méditations sur la beauté. Je suis au bon endroit, au bon moment, tout est parfait.

Cheng questionne: "Cette beauté naturelle que nous observons, est-elle une qualité originelle, intrinsèque à l'univers qui se fait, ou résulte-t-elle d'un hasard, d'un accident? " Je lève les yeux. Les branches ciselées des cerisiers se perdent dans le rose pâle des fleurs. Ce all-over digne d'un Pollock me transporte dans l'univers. Je l'imagine créé par un dieu esthète et quelques minutes plus tard je spécule sur une roulette russe cosmique. Qu'a-t-il bien pu se passer pour que l'univers soit si beau ?

François Cheng : "Si je poussais plus avant ma pensée, je dirais que notre sens du sens, notre sens d'un univers ayant sens vient aussi de la beauté, dans la mesure où justement, cet univers composé d'éléments sensibles et sensoriels prend toujours une orientation précise, celle de tendre, à l'instar d'une fleur, d'un arbre, vers la réalisation du désir de l'éclat d'être qu'il porte en lui, jusqu'à ce qu'il signe la plénitude de sa présence. On trouve en ce processus les trois acceptations du mot sens en français: sensation, direction, signification. "

En regardant ces fleurs de cerisiers qui symbolisent le caractère éphémère de la beauté, mon esprit dérive vers mon passage préféré du Petit Prince : "Ma vie est monotone. Je chasse les poules, les hommes me chassent. Toutes les poules se ressemblent, et tous les hommes se ressemblent. Je m'ennuie donc un peu. Mais, si tu m'apprivoises, ma vie sera comme ensoleillée. Je connaîtrai un bruit de pas qui sera différent de tous les autres. Les autres pas me font rentrer sous terre. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Et puis regarde ! Tu vois, là-bas, les champs de blé ? Je ne mange pas de pain. Le blé pour moi est inutile. Les champs de blé ne me rappellent rien. Et ça, c'est triste ! Mais tu as des cheveux couleur d'or. Alors ce sera merveilleux quand tu m'auras apprivoisé ! Le blé, qui est doré, me fera souvenir de toi. Et j'aimerai le bruit du vent dans le blé..."

La beauté est dans l'intention de celui qui regarde.

Peut-on voir la beauté? Ou devons-nous la penser pour qu'elle apparaisse?

Quand je pense à ces artistes-peintres présents dans ces deux livres, je me rends bien compte qu'ils n'ont pas fait que voir ces arbres. Ils les ont regardés. Le filtre de leur âme et de leur expérience de vie leur a permis de comprendre leur beauté. La beauté n'existe donc pas seule. C'est une construction du regardant.

Le futur regardant d'une œuvre est le spectateur. Voit-il la même beauté que l'artiste?

Est-elle différente car la personne qui la regarde est différente ?

Est-ce que la beauté d'une œuvre d'art n'existe que dans l'œil du spectateur ?

Cheng ajoute que la vraie beauté "est presque avant tout dans le désir et dans l'élan. Elle est un advenir, et la dimension de l'âme est vitale. De ce fait, elle est régie par le principe de vie."

C'est donc l'humain qui lui donne vie. Artiste ou spectateur, tant qu'il est vivant, il peut concevoir la beauté.

C'est Paul Klee qui disait que "l'art ne reproduit pas le visible, mais rend visible."

Le travail de l'artiste serait-il de rendre visible la beauté que nous aurions manqué de voir? Ou simplement de partager un regard personnel sur sa propre vision de la beauté?


Quelle place a la beauté dans notre vie? L'homme peut-il vivre sans voir la beauté? Ou la question est: comment l'homme peut-il survivre sans beauté? Est-ce que la vie existe sans la beauté? Si on demandait à l'Insee de faire un sondage sur le sujet, quelles seraient les questions ?

Ces temps-ci nous parlons beaucoup de solitude, nous savons que l'homme peut dépérir sans contact avec d'autres êtres humains. Peut-il aussi dépérir s'il ne trouve aucune beauté dans son quotidien? Tout en gardant en tête que la beauté apparait différemment à chacun.

Thomas Schlesser analyse que pour Van Gogh "il est évident que le contact avec le monde végétal et sa retranscription exaltée sur la toile relèvent à bien des égards d'un besoin curatif et anxiolytique. Il y puise par empathie avec son motif, un surcroît de vitalité, de plaisir et même de santé, comme s'il en absorbait la sève."

Je me demande si tout être humain est capable de cette empathie nécessaire pour appréhender la beauté. Est-ce une question d'émotion? Si on est coupé de ses émotions, peut-on éprouver la beauté?

Que devient la beauté sans émotion? Elle est utilisée pour la tromperie, la domination. Cheng nous dit "qu'une telle utilisation est la laideur même; elle constitue toujours un chemin de destruction."


Nous ne saurons jamais d'où vient la beauté et tant mieux.

En tant qu'être humain, nous l'avons ressentie et lui avons donné un nom. Depuis des millénaires, elle nous met en joie. N'est-ce pas le plus important?

Pour le botaniste Christophe Drénou, "prendre le temps de regarder une œuvre d'art, respecter la beauté d'un arbre, c'est aussi se faire du bien."

Alors noyons-nous dans la beauté, noyons-nous dans ce bien-être qu'elle nous procure.



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